Ce vitrail, dont l’origine précise est inconnue, provient d'une importante collection de fragments de vitraux et de rondels conservés au musée du Berry de Bourges. Acquis vers 1834 grâce au don de l'architecte Lebas (1869 ; Bailly, 1998), il est présenté au musée de l'hôtel Lallemant dans le cadre de l'exposition L'Hôtel Renaissance des Lallemant (4 avril 2019 - septembre 2020).

Parfait exemple de vitrail domestique, ce panneau à sujet profane, peint en grisaille et jaune d'argent sur un verre blanc, était sans doute destiné à être placé dans l'imposte d'une croisée. Sa partie centrale, le rondel proprement dit, est un carré posé sur la pointe illustré d'une ronde populaire : un groupe d'hommes et de femmes dansent autour de l'arbre de mai au son du tambourin et du fifre. Cette scène, bordée de bandeaux décoratifs à fin rinceaux (en partie modernes), est encadrée d'écoinçons qui confèrent au panneau une forme presque carrée. Les angles sont peints de « drôleries », de petits singes, tenant divers instruments de musique. Ce vitrail, d'une exécution rapide mais soignée, est dans un bon état de conservation. La facture de l'ensemble comme les costumes des personnages permettent de situer sa réalisation peu avant 1500 (Gatouillat, Kurmann-Schwarz et Leproux, 1998). Lui faisait face dans sa baie d'origine un autre vitrail comparable du musée du Berry (inv. 1865.286.2) sur le thème du Jeu du cheval fondu, jeu très ancien réservé aux garçons, consistant à se chevaucher l'un l'autre sans s'écrouler. Les allusions à ce qui se rapporte à la fécondité et à la virilité sont ici flagrantes (Hérold, 2019).

L'iconographie de la Danse paysanne, inspirée des thèmes bucoliques des marges des manuscrits enluminés réemployés à la fin du XV^e siècle dans les incunables parisiens, montre d'étroites parentés avec la ronde de pastoureaux des Heures de Charles d'Angoulême (Paris, Bibliothèque nationale de France, ms. lat. 1173, fol. 20v), enluminées par Robinet Testard vers 1480 (Lagabrielle, 2006). Il est probable que les vitraux civils illustrés de tels sujets, faits pour plaire à une large clientèle, étaient bien plus répandus à l'origine qu'on ne peut l'apercevoir aujourd'hui au vu de ceux qui nous sont parvenus. Citons, parmi les mieux conservés : un Joueur de cornemuse (Paris, musée national du Moyen Âge, inv. CL.23524, vers 1500) et le Jeu de la quintaine (New-York, Metropolitain Museum, The Cloisters Collection, 1980.223.6, vers 1500).

Bibliographie :

Catalogue du Musée de Bourges : Peinture, Bourges, A. Jollet, 1869, p. 51.

Coeur de France, Kunst des Berry von der Römerzeit bis zur Gegenwart, catalogue de l'exposition sous la dir. de Jean Faviere et Jean Goldman, Darmstadt, Mathildenhöhe, Düsseldorf, Kunsthalle, Munich, Stadmuseum, 1967-1968, Darmstadt, 1967, n°159. 

Traditions et art d'une province de France : le Berry, catalogue de l'exposition, Tokyo, 1974, n°122.

Gatouillat Françoise, « Les vitraux conservés au musée du Berry », Archéologia, n°134, 1979, p. 30 et ill. p. 29.

Les Vitraux du Centre et des Pays de la Loire : Corpus vitrearum, France, recensement des vitraux anciens de la France, 2, sous la dir. de Louis Grodecki, Françoise Perrot et Jean Taralon, Paris, CNRS, 1981, p. 189 et ill. p. 188.

Bailly Pierre, « Les acquisitions des vitraux par les musées de Bourges », L'art du peintre-verrier : vitraux français et suisses, XVI^e et XVII^e siècle, catalogue de l'exposition sous la dir. de Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Bourges, Le Parvis des Métiers, 28 mai-28 décembre 1998, Bourges, Chambre des Métiers du Cher, 1998, p. 42.

Gatouillat Françoise, Kurmann-Schwarz Brigitte, Leproux Guy-Michel, « Notices des vitraux conservés au Musée du Berry et à l'Agence des bâtiments de France du Cher », L'art du peintre-verrier : vitraux français et suisses, XVI^e et XVII^e siècle, catalogue de l'exposition sous la dir. de Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Bourges, Le Parvis des Métiers, 28 mai-28 décembre 1998, Bourges, Chambre des Métiers du Cher, 1998, n°21, p. 64.

Moyen âge : entre ordre et désordre, catalogue de l'exposition sous la dir. de Martine Clouzot, Christine Laloue et Isabelle Marchesin, Paris, Musée de la musique, 2004, Paris, Cité de la musique et RMN, 2004, n° 85, p. 206.

Vitraux, catalogue de l'exposition « Pinceaux de lumière : du modèle au vitrail » sous la dir. de Sophie Lagabrielle, Paris, Musée national du Moyen Âge-Thermes et Hôtel de Cluny, 18 octobre 2006 au 15 janvier 2007, Paris, RMN et Musée national du Moyen Âge-Thermes et Hôtel de Cluny, 2006, p. 105-107.

Figures libres, figures imposées de la danse, catalogue de l'exposition sous la dir. de Colette Jourdain-Annequin, Jean-Pascal Jospin, Martine Jullian, Saint-Antoine, Musée de Saint-Antoine-l'Abbaye, 13 juin au 19 septembre 2010, Grenoble, Patrimoine en Isère, Saint-Antoine, Musée de Saint-Antoine-l'Abbaye, 2010.

Izert Pauline, Une étude du vitrail : le cas des rondels du musée du Berry, mémoire de Master II Sciences Humaines et Sociales, Mention Histoire de l'art, sous la dir. de Pascale Charron, Tours, université François-Rabelais, [2019], p. 16 (vol. 1), p. 11 (vol. 2).

Hérold Michel, « Windows in Domestic Settings in France in the Late Middle Ages : Enclosure and Decoration in the Social Living Space », Investigations in Medieval Stained Glass. Materials, Methods, and Expressions, sous la dir. d'Elizabeth Carson Pastan et Brigitte Kurmann-Schwarz, Brill, 2019, p. 139-140.

Sources en ligne :

http://musees.regioncentre.fr/expositions/l-hotel-renaissance-des-lallemant