Art de la Renaissance en Val de Loire

inventaire, valorisation et analyse

Anna Coquier : Les gisants de Pierre de Bueil et de Marguerite de la Chaussée de la collégiale Saint-Michel-et-Saint-Pierre de Bueil.

Anna Coquier, Centre d'Etudes Supérieures de la Renaissance (CESR)

La collégiale Saint-Pierre, Saint-Michel et Saints-Innocents de Bueil-en-Touraine réunit sous son vocable deux monuments : l’église Saint-Pierre fondée au XIIe siècle puis reconstruite à la fin du XVe siècle et la collégiale Saint-Michel-et-Saints-Innocents dont la construction est commandée à la fin du XIVe siècle par les quatre frères seigneurs de Bueil, pour accueillir les sépultures de leur dynastie[1]. Les gisants de Pierre de Bueil († après 1414), un des commanditaires de l’édifice, et de Marguerite de la Chaussée († après 1443), épouse de ce dernier, y sont conservés.

Actuellement disposés sous des enfeus percés dans les murs de la nef – au nord pour Pierre de Bueil et au sud pour Marguerite de la Chaussée – les gisants n’occupent pas leur emplacement d’origine. D’après le dessin de Louis Boudan publié dans un album de Roger de Gaignères vers 1695[2], ils formaient à l’origine un unique tombeau. Le commentaire joint au dessin distingue ce dernier « enclavé dans le mur […] à main droite dans le chœur »[3] et décrit la dalle de marbre sur laquelle reposaient les gisants. Désormais conservée dans le caveau ménagé sous le chœur de la collégiale, cette dernière porte une inscription confirmant cette disposition[4]. Le témoignage de Dom Housseau au XVIIIe siècle[5] précise que ce tombeau mesure environ « trois pieds »[6], soit près d’un mètre. Enfin, une plaque de marbre renseignant les vies de Pierre de Bueil et de Marguerite de la Chaussé[7], encore en place et signalée par des sources écrites[8] au-dessus de l’enfeu réservé aux Bueil mais désormais occupé par l’effigie de Martine Turpin, situe initialement leur tombeau à l’entrée du chœur de la collégiale.

Vandalisés par les révolutionnaires, les gisants jetés dans le caveau de la collégiale ont été retrouvés en 1868 lors de fouilles archéologiques[9]. Contrairement à leur état actuel de conservation, une photographie, prise par Séraphin-Médéric Mieusement en 1881[10], montre les statues acéphales. D’après Jean-Jacques Bourrassé, les têtes des gisants sont mutilées mais bien conservées dans la collégiale en 1842[11]. Déposées au musée de la Société archéologique de Touraine en 1866[12], elles ont fait l’objet de relevés publiés en 1876 par Eugène Hucher[13] avant d’être définitivement replacées après 1969[14].

 


[1] J-J. Bourassé, « Notice historique et archéologique sur l’ancienne église collégiale de Bueil », dans Mémoires de la Société Archéologique de Touraine, Tome VII, Tours, 1842, pièce justificative II, p. 206.

[2] L. Boudan, Tombeau en socle vu en perspective sur lequel sont couchés un chevalier et une dame, vers 1695, dessin tiré d’un album de Roger de Gaignières, Bibliothèque nationale de France, département Estampes et photographie, Pe 2, f˚64.

[3] Ibid.

[4] Ibid. : « Cy gist Pierre de Bueil chevalier seigneur du Bois et de la Motte de Sonzay lequel trépassa l’an 1440 le ….. Cy gist Marguerite (de Chausse) sa femme laquelle trépassa l’an 1400…. ». L’inscription actuelle mentionne toutefois pour Pierre de Bueil, « lequel trépassa le   l’an mil CCCC    » et pour Marguerite de la Chaussée, « Cy gist dame Marguerite sa femme laquelle dame trépassa le   l’an mil CCCC   ».

[5] Bibliothèque municipale de Tours, ms 1436, f˚3, cité par L-R. Martinière, « La collégiale de Bueil et ses tombeaux », dans Bulletin et Mémoires de la Société Archéologique de Touraine, Tome XLVIII, Tours, 1909, pièce justificative II, p. 284.

[6] BM Tours, ms 1436, f˚3.

[7] Pour la transcription de cette inscription, voir J-J. Bourassé, « Notice historique et archéologique sur l’ancienne église collégiale de Bueil », dans Mémoires de la Société Archéologique de Touraine, Tome VII, Tours, 1842, p. 249-250.

[8] L. Boudan, op. cit., f˚64 : « Et à côté dudit tombeau est escrit sur un marbre en lettre gothiques ce marbre attaché au mur avec des pattes » et BM Tours, ms 1436, f˚3, cité par Louis R. Martinière, op. cit., pièce justificative II, p. 284 : « un peu au-dessus de ce mausolée, sur une plaque de marbre, appliquée au mur, à la hauteur de cinq pieds et demi ».

[9] J-X. Carré de Busserole, Dictionnaire géographique, historique et bio­graphique d’Indre-et-Loire et de l’ancienne province de Touraine, Tome I, Tours, 1878-1884, p. 458.

[10] Paris, Médiathèque de l’Architecture du Patrimoine, MH0000555.

[11] J-J. Bourassé, op. cit., p. 184.

[12] MAP, PM37000627 et PM37000629.

[13] E. Hucher, Monuments funéraires, épigraphiques, sigillographiques, etc. de la famille de Bueil, Paris, 1876, p. 2.

[14] MAP, PM37000627 et PM37000629 : Lettre de Michel Denieul adressée à Pierre Boille, le 5 novembre 1969 mentionnant la restitution prochaine des têtes.

Publié le 30/09/2022 par Pascale Charron