Musée du Berry Inv.D.1973.3.2 | ||
Ce panneau est issu d'une importante collection de fragments de vitraux et de rondels conservés au musée du Berry. Jusqu'en 1939, ce vitrail était monté dans l'une des baies de la chapelle axiale de la cathédrale de Bourges : il servait de bouche-trou dans l'une des scènes de la Vie de la Vierge offertes au début du XVIIe siècle par le Maréchal de La Châtre, où se voient toujours certains fragments de damas du même genre que celui du vitrail (Gatouillat, Kurmann-Schwarz et Leproux, 1998).
À l'origine en forme de médaillon, ce panneau a été complété par un certain nombre de pièces de remploi et de pièces de restauration visant à le rendre carré. On remarque en particulier la réutilisation, à l'envers, du corps d'une figure du même style et de même échelle dans le bas de la tunique du personnage assis à droite, près d'une pièce de chevelure, et, dans les angles supérieurs, des éléments de damas semblables à celui de la scène mais avec d'autres couleurs et motifs : ce sont là de probables vestiges d'autres scènes qui accompagnaient celle-ci dans le même contexte. Les rares pièces modernes occupent uniquement l'angle inférieur à gauche. Conformément à l'iconographie de la Pentecôte, un groupe constitué de onze apôtres, de la Vierge, figurée de dos et voilée de bleu, et d'une autre sainte femme se tient assis devant une tenture verte. Des langues de feu descendent des nuées bleues sur leurs têtes ; leurs gestes expriment la surprise qu'ils ressentent en constatant qu'ils comprennent et savent dorénavant parler les langues étrangères. Les chercheurs considèrent généralement que ce médaillon a été créé pour la Sainte-Chapelle, comme la petite tête d'homme barbu du musée du Berry (inv. 1962.X.71). Parmi les ajours des treize fenêtres de ce monument, d'après les élévations dessinées et la maquette du XVIIIe siècle exposée au Palais Jacques Cœur, seuls pourraient convenir les plus grands, placés au centre inférieur de chaque tympan. Cependant, on ne peut réellement comparer à ce panneau qu'une des grandes figures conservées dans la crypte de la cathédrale, celle identifiée comme un saint docteur de l'Église. Un rapport stylistique a été proposé avec l'œuvre de Jacquemart de Hesdin. En effet, les types de visages individualisés - et aux traits ingrats - rappellent ceux de cet artiste de l'entourage du duc du Berry. Les modèles des peintres et des enlumineurs circulaient dans les ateliers des peintres-verriers de Bourges, mais Brigitte Kurmann-Schwarz (1996) a récemment montré que ceux-ci ont essentiellement connu l'art de Jacquemart par les dessins de l'enlumineur nommé le « Pseudo Jacquemart », qui semble avoir beaucoup copié l'œuvre de ses contemporains (entre autres le Maître du Parement de Narbonne). Les peintres-verriers se sont servi de ces modèles qu'ils ont introduits dans leur propre fonds de dessins, et les ont employés très librement. Ainsi on ne trouve rien de semblable au manteau finement drapé de la Vierge dans les enluminures des manuscrits de Jean de Berry. En revanche, la même finesse d'application de la grisaille se retrouve dans les anges du couronnement de la verrière de Guillaume de Boisratier, placée au début du XVe siècle dans la cathédrale de Bourges (Gatouillat, Kurmann-Schwarz et Leproux, 1998).
Des Méloizes, Les vitraux de la cathédrale de Bourges postérieurs au XIIIe siècle, Lille, 1891-1894, p. 54.
Cœur de France, Kunst des Berry von der Römerzeit bis zur Gegenwart, catalogue de l'exposition sous la dir. de Jean Faviere et Jean Goldman, Darmstadt, Mathildenhöhe, Düsseldorf, Kunsthalle, Munich, Stadmuseum, 1967-1968, Darmstadt, 1967, n°124.
Scher Stephen K., « Notes sur les vitraux de la Sainte-Chapelle de Bourges », Cahiers d'Archéologie et d'Histoire du Berry, 1973, p. 23-44.
Traditions et art d'une province de France : le Berry, catalogue de l'exposition, Tokyo, 1974, n°107.
Les Vitraux du Centre et des Pays de la Loire : Corpus vitrearum, France, recensement des vitraux anciens de la France, 2, sous la dir. de Louis Grodecki, Françoise Perrot et Jean Taralon, Paris, CNRS, 1981, p. 185.
Kurmann-Schwarz Brigitte, Französische Glasmalerein um 1450, Ein Atelier in Bourges und Riom, Berne, Benteli, 1988, p. 92.
Kurmann-Schwarz Brigitte, « Le vitrail de Simon Aligret de la cathédrale de Bourges et les artistes au service de Jean de Berry », Mélanges offerts à J.-Y. Ribault, Cahiers d'Archéologie et d'histoire du Berry, n° hors série, 1996, p. 213-219.
Le monument et ses artisans. L'art du vitrail du XIIIe au XVIe siècle, Bourges, Palais Jacques Cœur, 1996 (texte de N. Blondel).
Gatouillat Françoise, Kurmann-Schwarz Brigitte, Leproux Guy-Michel, « Notices des vitraux conservés au Musée du Berry et à l'Agence des bâtiments de France du Cher », L'art du peintre-verrier : vitraux français et suisses, XVIe et XVIIe siècle, catalogue de l'exposition sous la dir. de Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Bourges, le Parvis des métiers, 28 mai-28 décembre 1998, Bourges, Chambre des métiers du Cher, 1998, n°4, p. 51.