Ce vitrail est issu d'une importante collection de fragments de vitraux et de rondels conservés au musée du Berry. Il ornait à l'origine une verrière monumentale de la Sainte-Chapelle de Bourges, fondée par le duc de Berry en 1392 et supprimée par lettres patentes de février 1757. Plusieurs panneaux des vitraux de la Sainte-Chapelle ont été remontés, à une date iconnue, dans les baies 38 et 42 de la chapelle du Sacré-Cœur de la cathédrale Saint-Étienne (Gatouillat, Kurmann-Schwarz et Leproux, 1998).

Le fragment montre la tête d'un homme barbu, couverte d'un bonnet phrygien, peinte sur du verre blanc. La grisaille est appliquée de manière très nuancée. Le verrier se sert d'un trait vigoureux pour indiquer la silhouette et les formes essentielles, comme les yeux et le nez. Il peint d'un trait fin les cheveux et la barbe, et modèle les surfaces du visage et du bonnet à l'aide de hachures courtes et d'un pointillé fin. Dans la cathédrale de Bourges, les anges de la chapelle du Sacré-Cœur (baies 38 et 42), qui proviennent de la Sainte Chapelle du duc de Berry, détruite en 1757, sont d'une facture comparable, avec le même contraste entre la peinture et les lumières obtenues par des enlevés de grisaille. Cette tête appartenait peut-être, comme Stephen K. Scher (1973) l'a suggéré, à un saint Joseph d'une scène de la Nativité du Christ. L'auteur a mis le fragment en rapport avec le cercle d'artistes appelés à la cour du duc Jean de Berry à Bourges et l'a rapproché des vitraux de la Sainte-Chapelle. Ceux-ci ont probablement été créés d'après des modèles du peintre et sculpteur André Beauneveu : cette hypothèse, déjà fort plausible en considération des critères stylistiques, s'est trouvée renforcée depuis que Jean-Yves Ribault (1992) a montré que la chapelle avait été construite et décorée entre 1391 et 1397. Les baies de celle-ci étaient formées de cinq lancettes, comprenant chacune au moins trois personnages dans des niches. Des scènes auraient pu être placées dans les ajours du couronnement, qui était dominé par un grand polylobe. On peut s'imaginer un médaillon dans le centre de ce dernier représentant une scène de la vie du Christ. Ainsi pourrait-on placer une suite de scènes en forme de médaillon dans les treize grandes fenêtres de la chapelle, et parmi eux un panneau représentant la Nativité (Gatouillat, Kurmann-Schwarz et Leproux, 1998).

Bibliographie :

Scher Stephen K., « Notes sur les vitraux de la Sainte-Chapelle de Bourges », Cahiers d'Archéologie et d'Histoire du Berry, 1973, p. 23-44.

Traditions et art d'une province de France : le Berry, catalogue de l'exposition, Tokyo, 1974, n°108.

Les Vitraux du Centre et des Pays de la Loire : Corpus vitrearum, France, recensement des vitraux anciens de la France, 2, sous la dir. de Louis Grodecki, Françoise Perrot et Jean Taralon, Paris, CNRS, 1981, p. 190, fig. 167.

Ribault Jean-Yves, « André Beauneveu et la construction de la Sainte-Chapelle de Bourges. Précisions chronologiques », Actes des Journées internationales Claus Sluter, Dijon, 17-21 septembre 1990, Dijon, Association Claus Sluter, 1992, p. 239-247.

Le monument et ses artisans. L'art du vitrail du XIII^e au XVI^e siècle, Bourges, Palais Jacques-Cœur, 1996 (texte de N. Blondel).

Gatouillat Françoise, Kurmann-Schwarz Brigitte, Leproux Guy-Michel, « Notices des vitraux conservés au Musée du Berry et à l'Agence des bâtiments de France du Cher », L'art du peintre-verrier : vitraux français et suisses, XVI^e et XVII^e siècle, catalogue de l'exposition sous la dir. de Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Bourges, Le Parvis des Métiers, 28 mai-28 décembre 1998, Bourges, Chambre des Métiers du Cher, 1998, n°3, p. 50.

Kurmann-Schwarz Brigitte, « Les vitraux des XIV^e et XV^e siècles », Bourges, la grâce d'une cathédrale, sous la dir. d'Emmanuel Audat, Béatrice de Chancel-Bardelot et Olivier Nauleau, Strasbourg, La Nuée bleue, 2017, p. 265.

Izert Pauline, Une étude du vitrail : le cas des rondels du musée du Berry, mémoire de Master II Sciences Humaines et Sociales, Mention Histoire de l'art, sous la dir. de Pascale Charron, Tours, université François-Rabelais, [2019], p. 29 (vol. 2).