Ce vitrail, dont l’origine précise est inconnue, est issu d'une importante collection de fragments de vitraux et de rondels conservés au musée du Berry de Bourges. Acquis vers 1834 grâce au don de monsieur Arrault, armurier de Bourges (1869 ; Bailly, 1998 ; Izert, 2019), il est présenté au musée de l'hôtel Lallemant, dans le cadre de l'exposition L'Hôtel Renaissance des Lallemant (4 avril 2019 - septembre 2020). De la collection de ce donateur proviennent deux autres panneaux conservés au musée du Berry : un rondel figurant un bœuf (inv. 1865.285.1) et un écu armorié avec trois sauterelles (inv. 1865.285.3).

Le panneau circulaire comprend, dans une bordure de rameaux fleuris, une pièce bleue en forme d'écusson. Cette pièce figure en son centre sainte Anne enceinte de la Vierge, elle-même représentée dans le sein de sa mère comme une enfant à la longue chevelure, environnée d'une gloire rayonnante. La silhouette de la sainte, peinte sur une pièce de verre blanc, est insérée à plombs vifs dans le verre bleu du fond, constituant un remarquable exemple de monture en chef-d’œuvre, demeurée absolument intacte. Il est probable que, plutôt qu'un rondel civil, ce panneau était l'écu armorié d'un monastère ou d'un chapitre collégial, et qu'il ornait l'église de cette communauté ou un des bâtiments qui en dépendait. Aucune description de cette symbolique particulière n'a été retrouvée dans la liste des établissements religieux dont les armes sont énumérées dans l'"Armorial général" publié dans les Mémoires de la Société des Antiquaires du Centre de 1883 (vol XII), ni de la fondation dont le vocable se rapporterait à l'Immaculée Conception. Néanmoins c'est assurément là un emblème choisi par des tenants du mouvement immaculiste. La doctrine qui présente la Vierge comme élue avant sa naissance et exemptée du péché originel ne devait prendre rang de dogme qu'en 1854, mais elle avait connu une popularité croissante à la fin du Moyen Âge, défendue en particulier par les Franciscains. L'expression alors la plus courante de cette thèse est illustrée par l'image du Baiser de sainte Anne à son époux Joachim devant la porte d'Or, qui trouve place dans tous les cycles consacrés à l'enfance de la Vierge. Une autre image proposée aux fidèles se développe au même moment, celle de Marie debout sur un croissant de lune envoyée du ciel par Dieu, souvent entourée des symboles des litanies. La représentation du panneau du musée du Berry exprime la même idée, mais d'une manière beaucoup plus exceptionnelle. Sans doute est-elle inspirée de la figuration de la "Vierge enceinte de l'expectation", qui rend visible le Christ dans le ventre de sa mère. L'usage d'un tel modèle expliquerait que le peintre-verrier ait donné à sainte Anne les traits d'une jeune fille plutôt que ceux d'une femme âgée, comme il est d'usage (Gatouillat, Kurmann-Schwarz et Leproux, 1998).

Catalogue du Musée de Bourges : Peinture, Bourges, A. Jollet, 1869, p. 50.

Les Vitraux du Centre et des Pays de la Loire : Corpus vitrearum, France, recensement des vitraux anciens de la France, 2, sous la dir. de Louis Grodecki, Françoise Perrot et Jean Taralon, Paris, CNRS, 1981, p. 189.

Bailly Pierre, « Les acquisitions des vitraux par les musées de Bourges », L'art du peintre-verrier : vitraux français et suisses, XVI^e et XVII^e siècle, catalogue de l'exposition sous la dir. de Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Bourges, Le Parvis des Métiers, 28 mai-28 décembre 1998, Bourges, Chambre des Métiers du Cher, 1998, p. 42.

Gatouillat Françoise, Kurmann-Schwarz Brigitte, Leproux Guy-Michel, « Notices des vitraux conservés au Musée du Berry et à l'Agence des bâtiments de France du Cher », L'art du peintre-verrier : vitraux français et suisses, XVI^e et XVII^e siècle, catalogue de l'exposition sous la dir. de Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Bourges, Le Parvis des Métiers, 28 mai-28 décembre 1998, Bourges, Chambre des Métiers du Cher, 1998, n°13, p. 59.

Izert Pauline, Une étude du vitrail : le cas des rondels du musée du Berry, mémoire de Master II Sciences Humaines et Sociales, Mention Histoire de l'art, sous la dir. de Pascale Charron, Tours, université François-Rabelais, [2019], p. 16 (vol. 1), p. 19 (vol. 2).

Sources en ligne :

http://musees.regioncentre.fr/expositions/l-hotel-renaissance-des-lallemant