Église Saint-Cyr | ||
Composée de cinq lancettes et d'un tympan à trente mouchettes, cette grande verrière datée autour de 1470 fut commandée par la famille royale et l'archevêque de Bourges dans le cadre de la reconstruction du chœur de l'église collégiale, partiellement détruite durant la guerre de Cent Ans. Les têtes de lancettes sont ornées des armoiries des donateurs : Charles de France, duc de Berry (1461-1465) (d'azur, à trois fleurs de lys d'or, à la bordure engrêlée de gueules) ; Charlotte de Savoie, reine de France (de gueules à la croix d'argent) ; Louis XI, roi de France (1461-1483) (d'azur à trois fleurs de lys) ; le dauphin, le futur Charles VIII (écartelé : aux I et IV, d'azur à trois fleurs de lys d'or ; aux II et III, d'or au dauphin d'azur) ; Jean Cœur, archevêque de Bourges (1446-1483) (d'azur à la fasce d'or chargée de trois coquilles de sable et accompagnée de trois cœurs d'or). Sous un tympan peuplé d'anges musiciens, le vitrail met en scène la Crucifixion et la Vie de saint Cyr et sainte Julitte, relatée en vingt-trois épisodes (à l'origine vingt-cinq). Le registre inférieur, qui devait accueillir les portraits des commanditaires, a reçu des fragments de provenances diverses.
Fortement endommagée lors d'un violent orage survenu en 1807 (sept panneaux entièrement détruits), la verrière a été restaurée au début du XIXe siècle, puis remaniée entre 1939 et 1945 par les ateliers Tournel (Paris) et Chigot (Limoges) (Grodecki, Taralon et Perrot, 1981, p. 203). En 2009, l'atelier Lorin-Hermet-Juteau (Chartres) a restauré et complété la partie inférieure du vitrail de dix panneaux « illusionnistes » (notice d'Olivier Geneste en ligne sur la base POP). Avant d'être reposés, l'ensemble des vitraux historiés ont été présentés au musée de l'Hospice Saint-Roch d'Issoudun, du 15 octobre au 21 novembre 2010.
La Vie de saint Cyr et sainte Julitte est narrée en vingt-trois tableaux répartis sur cinq registres et encadrés par un même édicule en grisaille et jaune d'argent, composé de colonnettes supportant un arc surbaissé. Chaque scène occupe deux panneaux. Le sens de lecture du cycle narratif se fait de gauche à droite, et de haut en bas.
Au registre supérieur : un ange apparaît en songe à Julitte et son fils Cyr, et leur ordonne de se faire baptiser ; Cyr et Julitte sont baptisés par un ermite ; un ange leur ordonne de quitter Icône ; avant leur départ, Cyr et Julitte distribuent leurs biens aux pauvres. Au second registre : Cyr et Julitte quittent Icône accompagnés d'une servante ; le gouverneur Alexandre est averti ; Alexandre et sa femme sacrifient aux idoles ; délibération d'Alexandre et de ses conseillers. Au troisième registre : Julitte comparaît devant Alexandre ; Cyr est amené devant le tribunal ; Cyr et Julitte sont torturés (supplice des clous) ; Cyr et Julitte sont menacés d'un nouveau supplice ; Cyr et Julitte sont conduits en prison. Au quatrième registre : en prison, deux anges leurs apparaissent et les réconfortent ; les démons encouragent Alexandre et sa femme à persécuter les chrétiens ; Cyr et Julitte comparaissent à nouveau devant le tribunal ; Cyr et Julitte prêchent depuis leur prison, le peuple s'assemble devant leur fenêtre ; Cyr et Julitte comparaissent pour la troisième fois devant Alexandre. Au cinquième registre : Julitte est fouettée ; Cyr lacère le visage d'Alexandre qui le tue en le projetant au sol ; des chrétiens sont décapités sur ordre d'Alexandre ; des chrétiens rassemblent les restes de Cyr et de Julitte ; les reliques de saint Cyr et de sainte Julitte sont vénérées.
Les sixième et huitième registres sont occupés par des panneaux « illusionnistes » réalisés en 2009-2010 par l'atelier Lorin-Hermet-Juteau de Chartres. Ils sont composés de plusieurs verres de couleur, ainsi que de fragments de décors architecturés employés dans les encadrements. Au registre inférieur se trouvent des pièces anciennes de provenances diverses, sans doute réemployées en 1807 : un saint évêque (brocarts montés en chef-d'œuvre) (XVe siècle) ; un saint Jean-Baptiste (tête repeinte) accompagnée d'un couple de donateurs (bustes conservés, têtes repeintes) (XVe siècle) ; huit têtes d'hommes dont celle du Christ (tête repeinte) (XVe-XVIe siècles) ; un saint Jean-Baptiste (emploi du même carton que le précédent) (tête repeinte) avec un donateur (tête repeinte) (XVe siècle) ; une Vierge à l'Enfant (XVe siècle).
Employé tout au long des XVe et XVIe siècles, le système de compartimentation horizontale du vitrail de Saint-Cyr d'Issoudun convient particulièrement au domaine du vitrail, contraint par ses articulations de pierre et de métal. Cette mise en page se retrouve dans plusieurs verrières hagiographiques de la région, comme à Cour-sur-Loire (Saint-Vincent, baie 5, vers 1495-1515) et à Bourges (Notre-Dame, baie 5, vers 1500 ; Saint-Étienne, baie 46, vers 1520). En dépit de nombreuses altérations et restaurations (peinture effacée et nombreux plombs de casse), la verrière de la Vie de saint Cyr et sainte Julitte montre une exécution délicate, avec l'emploi de grisailles de plusieurs teintes et de jaune d'argent pour rehausser les architectures, les vêtements et les chevelures. Des découpes complexes et des pièces montées en chef-d’œuvre sont également visibles (vêtements damassés). Selon Frédéric Elsig (2018, p. 152-153), le vitrail montre des parentés stylistiques avec l'art du peintre et enlumineur Jacquelin de Montluçon, documenté à Bourges entre 1491 et 1505. D'après l'auteur, certains panneaux présentent une mise en page, un rythme et des morphologies proches de la Résurrection de Lazare (Lyon, Musée des Beaux-Arts, vers 1496-1497).
Sources manuscrites :
Bibliothèque nationale de France
Guilhermy, Localités de France, N.a.fr.6101, f. 147v (1867).
Charenton-le-Pont, Médiathèque de l'architecture et du patrimoine (MAP)
Archives des Monuments Historiques (ACMH), Dossier Issoudun.
Archives des Monuments Historiques (ACMH), Lafond, Notes (1900-1914).
Bibliographie:
Pérémé Armand, Recherches historiques et archéologiques sur la ville d'Issoudun, s.l., 1847, p. 271.
Cougny de, « Lettre à M. de Caumont sur quelques antiquités du Berry », Bulletin monumental, t. 1, 1865, p. 489.
Voisin Abbé F., « L'église et le chapitre de Saint-Cyr d'Issoudun », Le Bas-Berry, 1877, p. 181-193, 309-321, 341-348.
Chevalier R.P. Jules, Histoire religieuse d'Issoudun depuis sa fondation jusqu'à nos jours, Issoudun, 1899, p. 109-162.
Maget G. et Rabier J., « La merveille d'Issoudun. La vieille vitre de l'église Saint-Cyr », Revue du Berry et du Centre, 1925, p. 33-38.
Planchenault René, « Vitrail de la collégiale Saint-Cyr d'Issoudun », Bulletin de la Société nationale des Antiquaires de France, 1939-1940, p. 173-189.
Lafond Jean, Le vitrail français, sous la haute direction du musée des Arts décoratifs de Paris, Paris, 1958, p. 195.
Les Vitraux du Centre et des Pays de la Loire : Corpus vitrearum, France, recensement des vitraux anciens de la France, 2, sous la dir. de Louis Grodecki, Françoise Perrot et Jean Taralon, Paris, CNRS, 1981, p. 202.
Vitraux de l'Indre. Éclats de la lumière, sous la dir. de Michel Maupoix, Châteauroux, Conseil Général de l'Indre / Rencontre avec le Patrimoine religieux, Poitiers, 2007, p. 77-95.
Elsig Frédéric, « Jacquelin de Montluçon : enlumineur, peintre et verrier », Peindre à Bourges aux XVe et XVIe siècles, sous la dir. de Frédéric Elsig, Cinisello Balsamo, Milan, 2018, p. 152-153.
Sources en ligne:
https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/IM36002201
https://www.museeissoudun.tv/exposition.37.la-restauration-des-vitraux-de-leglise-saintcyr.html
https://www.museeissoudun.tv/exposition.37.la-restauration-des-vitraux-de-leglise-saintcyr.html
http://musees.regioncentre.fr/expositions/la-verriere-restauree-de-l-eglise-saint-cyr-d-issoudun
https://bibale.irht.cnrs.fr/19578?search=engrel%C3%A9e%20de%20gueules
https://bibale.irht.cnrs.fr/20277
https://bibale.irht.cnrs.fr/20469?search=dauphin
https://bibale.irht.cnrs.fr/22933?search=savoie